Daniel Pantchenko
Jean Ferrat
« Je ne chante pas pour passer le temps. »
Editions Fayard – 2010
Je
rends hommage à sa première femme :
Christine
Sèvres.
Elle est née à Paris en 1931. Son grand-père la rêvait comme une chanteuse, son père aurait aimé qu’elle devienne une écrivaine. Elle s’orientera vers la poésie. (p 75).
Après des petits boulots, elle parvient à chanter tout en mangeant, dans des cabarets Rive Gauche.
En 1956, Serge Gainsbourg l’accompagne au piano. (p 76).
Elle obtient plus de succès que Jean Ferrat. (p 77).
Elle joue au théâtre et apparaît à la télévision. (p 79).
En 1959, elle chante Bruant. Elle poursuit son ascension dans les cabarets parisiens. En 1960, elle chante Ferrat, à la télévision. Elle chante à la Colombe (p 88).
Marcel Yonnet, compagnon d’Anne Sylvestre, l’accompagne au piano.
Elle investit l’Ecluse, où chante Barbara. Pour Pia Colombo et Francesca Solleville, elle était la star. Intransigeante, elle chante des paroles dures. Elle n’enregistre pas de disque. Les chanteuses interprètes sont en chute face aux chanteurs compositeurs. (p 81).
En 1961, elle chante trois chansons sur un disque collectif qui reste confidentiel. Elle préfère être une artiste de scène. (p 101).
Elle apparaît à la télévision pour chanter une chanson. (p 104).
En 1962, elle devient « la femme de ». Malgré elle. Elle sort son premier disque personne.
Elle part en tournée pendant trois mois avec Georges Brassens en 1963. Elle enregistre un second 33 tours. (p 127).
Face à la vague de rock et de twist en 1965, elle arrête de chanter. (p 128).
En 1964, elle repart en tournée avec Brassens et chante aussi à la télévision. Au théâtre de Plaisance, elle présente six chansons ; Elle occupe la scène centrale à la Fête de l’Humanité ; A Bobino, elle est la vedette américaine de Brassens. (p 142).
Elle chante à la télévision avec jan Ferrat en juin 1965. (p 168).
Elle décide d’arrêter de chanter pour écrire. Jean Ferrat est devenu une vedette, pas elle. (p 188).
En 1967, elle se prépare à relancer sa carrière et enregistre son premier 33 tours. (p 224).
Elle repart avec Brassens en tournée. (p 238).
Quand on reproche à Ferrat de ne pas avoir écrit assez pour elle, elle le défend en disant qu’il n’a pas le temps. (p 250).
En 1969, elle chante en première partie de Serge Reggiani, à Bobino. (p 255).
Jean Ferrat la considère comme sa compagne, pas comme une chanteuse. (p 260).
Il avait chanté deux chansons anti féministes à ses débuts. Pour lui, la femme a un rôle concret. (p 261).
En 1969, chez Denise Glaser, Christine Sèvres a un trou en pleine chanson. Les commentaires ne sont pas élogieux pour elle. Elle enregistre son second 33 tours. (p 293).
Dépressive, elle ne veut plus chanter. Elle se réfugie en Ardèche pendant neuf mois. (p 296).
A Antraigues, Christine peint. Mais elle est isolée et se retrouve seule. Tous ses amis et amies sont à Paris. (p 357).
Elle était devenue alcoolique pour « cautériser cette plaie existentielle ». ( !?) Dépressive, elle n’a pas été soignée.
Elle meurt à Marseille en 1981. (p 382).
J’ajouterai ceci : son talent a été sacrifié face à la réussite de son mari. Elle a cédé devant la puissance créatrice de Jean Ferrat. Elle ne pouvait pas reconnaître qu’elle souffrait d’être dans l’ombre de Jean Ferrat. Elle est devenue uniquement « sa » femme. Il rapportait l’argent, ils possédaient deux biens immobiliers, pourquoi aurait-elle pu se plaindre ? Elle aurait du se satisfaire de ce confort familial. Pour elle, c’est fini. Son talent n’est plus reconnu, vanté, loué. Elle doit rentrer dans le rang de la routine, avec un retour à la maison pour préparer à manger, laver, acheter, prévoir les réparations. Elle voulait échapper au train-train. Elle ne voulait pas renoncer à la scène, aux lumières, aux tours de chant, aux copineries et aux rivalités entre artistes.
Jean Ferrat lui a reproché sa rigueur professionnelle et lui a reproché de ne pas avoir assez pris soin d’elle. Lui, créateur contesté ou adulé, censuré ou promu, ne la voyait plus que comme une gouvernante, une mère. Il n’a pas vu qu’elle souffrait. Elle a été jetée au rebut.
Elle a du commencer à boire dans les cabarets. Ils sont faits pour ça. Mais quand la dépression est apparue et s’est installée, elle a pensé que la douleur disparaîtrait sous des litres d’alcool. Elle cherchait un moyen d’endormir sa souffrance, sans imaginer qu’elle l’entretiendrait ainsi. Elle s’est noyée dans l’alcool et le chagrin. Elle s’est oubliée dans l’alcool, mais l’alcool ne l’a pas oubliée. A l’époque, on ne se battait pas contre l’alcoolisme comme maintenant.
Sa raison d’être et son expression personnelle lui ont été retirées. Son talent a été nié.
Elle a été sacrifiée par le show biz et a été enterrée à Antraigues.
Elle s’est battue, n’a pas été seule, mais peu de mains lui ont été tendues. Elle a du renoncer à sa raison de vivre. Elle avait sa fille, mais, dire non à sa carrière a été un énorme sacrifice.
On a invoqué le trac, mais après tant d’années, est-ce crédible ?
On lui a reproché de ne pas avoir chanté de chansons d’amour. Elle n’était pas la seule interprète à le faire. Elle a chanté des textes de Brigitte Fontaine qui a réussi à survivre dans ce difficile milieu grâce à sa création personnelle de textes.
Comment Christine Sèvres pouvait-elle rivaliser avec un chanteur, Jean Ferrat, qui composait sa musique et a écrit la moitié des textes de ses chansons ?
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