mardi 28 avril 2020

Littérature - Princesse Bibesco. "Catherine-Paris".


Princesse Bibesco.
Catherine-Paris.
Edition « Les Cahiers Rouges »
1927, éditions Bernard Grasset.





Les chapeaux de la princesse Bibesco

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C’est un bijou. Chaque mot est imaginé dans le cristal poétique ciselé par l’imaginaire léger et profond de princesse Bibesco. Chaque phrase est aérienne et taillée dans l’humanité féminine. Le désespoir est caché derrière le style historico-poético-narratif. Mais d’où sort-elle toutes ces images ? « Elle croyait avoir dérobé pour son fils le feu du ciel »….Elle nous embarque dans un chariot céleste, au-dessus de la mêlée, et nous raconte trois destinées de femmes, liées par leur condition, leurs espoirs, leurs amours, leurs rébellions. C’est simple comme de l’eau de roche. C’est compliqué comme du quartz. C’est beau comme du diamant. Les hommes ne sont pas en reste car un oncle entrera lui aussi en rébellion contre l’ordre et les valeurs familiales.
Dès le premier mot de ce roman, l’ambiance féministe est campée.
En se mariant, la grand-mère de Catherine-Paris a perdu son argent en donnant sa dot à son époux. Mais elle gardera sa liberté d’esprit en faisant de sa vie ce qu’elle veut sans avoir jamais à se justifier. Le secret de sa résistance provoquera l’incompréhension de son entourage familial.  Son mari avait le luxe malheureux. Ayant la loi pour lui, il ne le comprenait pas. Elle éduquera ses neufs enfants avec une éducation libérale à Paris. La vengeance de son mari après le départ de sa femme loin de lui se retournera contre lui. Les enfants le désavoueront eux aussi.
La mère de Catherine-Paris rejoindra la grand-mère, sa mère, plus tard. Elles formeront le clan de la liberté contre la tyrannie paternelle. Guignol devient le symbole de l’éducation à la française, marquée par l’irrespect, la malice, la curiosité. Catherine-Paris est élevée dans cette ambiance insouciante jusqu’à son mariage.
Elle épousera l’aristocratie européenne, étrange mélange issu de Paris, de Vienne, de Saint-Petersbourg, et d’autres grandes villes. « On dédaignait davantage en étant plus haut, on respectait de moins en moins en s’élevant ; il se trouva qu’elle (= Catherine-Paris, NDLR) ne respectait plus rien du tout. » (p 179)
Ils sont tous cousins et cousines. Mais, on préfère secrètement les Français. Chateaubriand avait écrit dans ses Mémoires d’Outre-tombe : « Monsieur Ancillon, de même que beaucoup d’hommes illustres de la Prusse, était d’origine française. » (p 186). )  Ou bien encore : « J’ai vu jouer la Jeanne d’Arc de Schiller ; quel peuple que ce peuple français ! Comme il occupe les autres peuples ! » (p 198)
La cour de Louis XIV fait toujours référence. A Schlossenbad, (= Schloss Bad, Allemagne, NDLR) « le déjeuner s’appelait dîner, comme à la cour de Louis XIV, et le dîner, souper. Il y avait cercle après dîner. »
La chasse y est élevée en culte. « Le prince Louis-Ferdinand était un homme d’une cinquantaine d’années, qui chassait depuis l’âge de ses sept ans et ne pensait qu’à la chasse. Entendre bramer les cerfs, c’était pour lui la plus belle musique, un tableau, cela voulait dire plusieurs rangées de bêtes mortes ; la table, c’était la venaison ; l’amour, pour lui, c’était le rut. » (p 106). Catherine-Paris se soustraira à ce rituel. Elle pense que la chasse est inutile depuis la création des boucheries.
Catherine-Paris est trahie par son mari qui batifole de côté. L’amour n’existe pas entre eux. Elle devient la proie de tous les hommes qui l’entourent. « Adam (son mari) éprouva le besoin d’humilier en secret la triomphatrice (la beauté de Catherine-Paris attire les jalousies, NDLR) et employa, pour y parvenir, le meilleur moyen connu d’infliger de la honte aux femmes : les posséder sans les aimer. » (= le viol, NDLR). (p 165)
Son mari, avec les années, perd de son attrait. « Il devenait le jouet de plusieurs ; aucune femme ne l’aimait assez pour le garder contre toutes les autres. » (p 232)
Catherine-Paris compte peu d’appuis autour d’elle. Madame de Girardin* avait dit : « Une cousine germaine est une ennemie donnée par la nature. »
Pour s’occuper, elle voyage de capitale en capitale. Paris est le lieu où l’on se vêt. Napoléon avait écrit : « Une femme a besoin de six mois de Paris pour connaître ce qui lui est dû, et quel est son empire. » (p 245).
Puis, je vous laisse découvrir l’apothéose du livre. De surprise en surprise, on est tenu en haleine jusqu’au bout. Les descriptions des caractères, des ressorts psychologiques sont d’une finesse inouïe. J’ai fermé la dernière page à regrets.

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Delphine Gay, épouse de Girardin, née le 24 janvier 1804 à Aix-la-Chapelle et morte le 29 juin 1855 à Paris, est une écrivaine, poétesse, nouvelliste.


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